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Rachialgies inflammatoires de l’homme jeune : le piège

Posté le 14/06/2012 Par Le Pr Daniel WENDLING

LE CAS

Cet homme de 33 ans souffre de dorsolombalgies depuis 3 mois avec réveils nocturnes invalidants dans la vie quotidienne sans facteur déclenchant.

Le patient est apyrétique, ne présente pas de signes généraux.

L’examen clinique ne met  pas en évidence de déficit sensitivomoteur ou de signes neurologiques ; les aires ganglionnaires sont libres et il n’existe pas d’organomégalie.

Il n’y a pas d’antécédent personnel ou familial notable.

Le bilan biologique initial ne trouve pas d’anomalie de la numération formule sanguine, la CRP est à 1,8mg/L, le ionogramme  et l’électrophorèse des protéines sériques sont sans anomalie, la calcémie est à 2,16mmol/L.

Les radiographies du rachis dorsolombaire objectivent un tassement vertébral T11 sans recul du mur postérieur.

Une IRM du rachis est réalisée (Figure 1). 

 

Figure 1 : IRM du rachis coupe sagittale, séquence T1 gado; hypersignal des vertèbres thoraciques basses, déformation des corps de T8 et T11, avec envahissement épidural en arrière de T11. 

 

Evolution
Le patient bénéficie d'une prise en charge chirurgicale rapide avec décompression médullaire, stabilisation du rachis et biopsie à visée diagnostique.
Le diagnostic de lymphome B à grandes cellules de type lymphome anaplasique est retenu sur l'anatomopathologie.
Le bilan d'extension (scintigraphie, pet TDM et TDM TAP) ne retrouvant pas de localisation autre que rachidienne (Figure 2) , le diagnostic de lymphome osseux primitif multifocal est donc envisagé et le patient bénéficie actuellement d'un traitement par chimiothérapie (R-CHOP).
 
 
Discussion
Les lymphomes malins sont classés selon différents critères, les principales classifications actuelles utilisées sont celle de Ann Arbor (selon l'extension du lymphome) et celle de l'OMS (critères immunohistochimiques). Les lymphomes malins non hodgkiniens (LMNH) sont les plus fréquents (7 à 12/100000 habitants/an), dans 7 à 25 % des cas, il existe une localisation osseuse qui est révélatrice de la maladie dans 5 % des LMNH. Ce sont les atteintes rachidiennes qui sont le plus souvent révélatrices.
Parmi les localisations osseuses des lymphomes, on distingue le lymphome osseux :
  • Primitif (de Parker et Jackson) : une lésion osseuse unique, une preuve histologique, un bilan d'extension négatif.
  • Secondaire : un bilan d'extension révélant d'autres localisations viscérales ou ganglionnaires occultes.
  • Primitifs multifocal : absence de localisation viscérale ou ganglionnaire à distance dans les 6 mois suivant la présentation clinique.
Les lymphomes osseux primitifs sont une entité rare, ils représentent 1 % des LMNH, sont plus fréquents chez l'homme que chez la femme. L'âge moyen de survenue est de 45 à 48 ans ; la principale manifestation clinique est la douleur (65 % des cas), les signes généraux sont rares et l'hypercalcémie exceptionnelle. Les os longs sont touchés dans près de 50 % des cas (fémur 20 à 25 %), le rachis est atteint dans 15 à 20 % des cas et les localisations multifocales présentes dans 3 à 16 % des cas. Il s'agit le plus souvent de lymphome B à grandes cellules de grade de malignité intermédiaire ou élevé.
Les lymphomes osseux secondaires sont plus fréquents (25 % des lymphomes), ils surviennent un peu plus tardivement (49 à 56 ans), la douleur est souvent au premier plan, mais des signes généraux sont présents  dans 20 % des cas. L'hypercalcémie reste rare. L'atteinte plurifocale est fréquente (70 %).
L'imagerie IRM est totalement aspécifique  du caractère primitif ou secondaire ; l'intérêt de l'IRM réside dans l'évaluation des atteintes des parties molles.
Le pronostic des lymphomes osseux primitifs à 5 ans est meilleur que celui des lymphomes osseux secondaires (50 à 88 % de survie à 5 ans contre 20 à 25 % de survie à 5 ans pour les lymphomes osseux secondaires). Les facteurs de mauvais pronostic sont l'atteinte plurifocale, l'extension aux tissus mous, les localisations rachidiennes et au os du pelvis, le type histologique.
Le bilan d'extension permet de différencier le lymphome osseux primitif du lymphome osseux secondaire, et a, par ce biais, un intérêt pronostique.
Le traitement  est similaire pour les lymphomes osseux primitif ou secondaire ; il consiste en un traitement de type R-CHOP. Certaines équipes retiennent une indication chirurgicale dans certaines localisations osseuses primitives uniques (fémur seul par exemple).
 
 
Conclusion
Les lymphomes osseux primitifs sont une entité rare qui ont un meilleur pronostic que les lymphomes osseux secondaires.
 
 
Bibliographie
  • Smith ZA.  Primary bony non hodgkin lymphoma of the cervical spine: a case report. Journal of medical case reports 2010; 4:35.
  • Horsman JM., Primary bone lymphoma: a retrospective analysis. International Journal of Oncology, 2006; 28:1571-1575.
  • ZHENG JS, Isolated Primary Non-Hodgkin's Lymphoma of the Thoracic Spine: a Case Report with a Review of the Literature. The Journal of International Medical Research 2010; 1553-1560.
 
 
Figure 2 : PET-TDM : hypermétabolisme du rachis thoracique inférieur.

 

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