Insomnie du sujet âgé

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Plainte d’insomnie d’endormissement

Posté le 25/02/2022 Par Le Dr Isabelle POIROT

LE CAS

Monsieur H., âgé de 35 ans, vient en consultation pour un problème d’insomnie évoluant depuis l’adolescence. Il a utilisé par périodes des hypnotiques, mais sans succès. Il avait remarqué s’endormir plus facilement grâce au cannabis, qu’il utilise encore de temps à autre avec un certain succès.

 

Le patient présente des difficultés d’endormissement : quelle que soit l’heure à laquelle il se couche, impossible de s’endormir avant 3 heures. Il s’occupe dans son lit : lecture, musique, jeux…, il a tout essayé, sans succès et l’arrêt des “écrans” n’a pas vraiment résolu ce problème (il précise qu’il a recommencé à utiliser son smartphone). Une fois endormi, il ne se réveille plus. Le lever la semaine est difficile. Pour le travail (professeur des écoles), il est obligé de se lever à 7 heures. Heureusement, le week-end, il peut dormir jusqu’à midi pour récupérer.

 

Lorsqu’il était étudiant, les difficultés étaient plus faciles à gérer, même s’il lui arrivait (souvent) de rater les cours le matin. En revanche, depuis qu’il a commencé ses stages et qu’il est entré dans la vie active, il décrit un retentissement important sur sa qualité de vie.

 

Il existe une réelle appréhension par rapport à ses capacités de sommeil. Son niveau d’activité reste intéressant, mais il lui est difficile de rester maître de ses émotions dans la journée. Il se sent plus irritable, et énervé, surtout le matin, ce qui le gêne énormément dans son travail. Il a essayé de trouver des aménagements dans son travail pour être moins en difficulté avec ses élèves (activité physique le matin, arts plastiques…). Il a peur cependant que cela ne se voie et que les parents d’élèves soient mécontents. Il rumine beaucoup à ce sujet lorsqu’il n’arrive pas à s’endormir, ce qui déclenche un état de tension non négligeable. En revanche, il adore préparer ses cours et corriger les copies le soir dans son lit.

 

Il n’a aucun antécédent. L’examen clinique est normal.

 

SP-22.22

Le syndrome de retard de phase est défini par un retard de la phase principale du sommeil par rapport aux horaires veille-sommeil souhaités (critères diagnostiques de l’ICSD-3, 2014). La plainte disparaît lorsque le patient peut choisir son propre rythme de sommeil, en l’absence de toute contrainte horaire. Il est assez commun chez l’adolescent, en lien avec une possible vulnérabilité (effet d’entraînement du rythme biologique endogène et hypersensibilité à la lumière) et aggravé par les comportements (exposition aux écrans, cannabis, activités vespérales). Il faut s’en méfier devant une plainte d’insomnie d’endormissement associée à une somnolence diurne excessive.

 

On retrouve souvent des facteurs familiaux. Certains patients atteints de pathologies, comme les troubles du spectre autistique, mais également ceux souffrant d’un trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité sont à risque de présenter un décalage de phase. La littérature montre aussi l’association fréquente avec un trouble dépressif, l’échec scolaire, l’absentéisme.

 

Le traitement d’un décalage de phase repose avant tout sur des techniques de chronothérapie (recul progressif des heures de coucher et de lever par retard progressif de la phase jusqu’à atteindre des heures de coucher et de lever stables et adaptées) et non sur les thérapies cognitivocomportementales comme dans l’insomnie chronique. Une fois les heures de lever et de coucher définies, elles doivent rester stables dans le temps, week-end compris.

 

Il est possible de s’aider de la luminothérapie à raison de 10 000 lux, dans la demi-heure suivant le lever, pendant 30 minutes, tous les jours. L’exposition à la luminothérapie est cependant codifiée et réalisée quotidiennement, à heure fixe, une fois le rythme veille-sommeil souhaité atteint.

 

Les études ont également montré l’intérêt de la mélatonine exogène, notamment la mélatonine à libération immédiate. Son effet chronobiotique s’installe de façon différée et dépend surtout du moment de la prise et non de son dosage. Le groupe d’experts français préconise de débuter par une faible dose de 0,5 mg, 4 à 6 heures avant l’heure habituelle d’endormissement (contrairement à l’effet sédatif qui survient à des doses de mélatonine plus élevées (1 à 5 mg), proches de l’heure du coucher).

 

En cas de traitement au long cours, le tableau clinique doit être réévalué, et une fenêtre thérapeutique annuelle est recommandée. La prise de mélatonine doit obligatoirement être accompagnée d’un renforcement des synchroniseurs extérieurs et du renforcement de l’alternance lumière/obscurité. La mélatonine à libération prolongée n’a pas d’indication dans ce cadre. L’exposition à la lumière ou l’administration de la mélatonine à des moments du rythme circadien inadaptés peuvent être inefficaces, voire aggraver le trouble du rythme circadien.

 

Quera-Salva MA et al. Médecine du sommeil 2021;18(2):55-69

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